9 juin 2015
Les volets électriques se relevèrent petit à petit dans un bruit froid et métallique. La lumière perçait le voile d’obscurité à ses pieds d’abord, puis entièrement son corps. Derrière la baie vitrée, la base s’étendait en contre bas et plus loin vers le sud, s’étendant la jungle marécageuse jusqu’à l’océan, à peine visible au-dessus de la ligne de crête qui cernait l’île. Sur la grande place centrale, les troupes de l’organisation étaient à l’entraînement. Même si cette dernière n’avait pas été très active depuis le raid sur Nublar, le personnel se devait de rester en forme. Les soldats s’étaient donc rassemblés de bonne heure, sous les ordres de leurs superviseurs, afin de pratiquer les exercices physiques qui leur garantiraient une redoutable efficacité sur le terrain. Ce n’était pas pour rien que les pertes humaines avaient été si réduites dans le camp de la Chimère lors de l’attaque surprise sur l’île des brumes. Une poignée de soldats abattus par les rangers tout aux plus, là où, dans le camp opposé, les morts avaient dépassé la centaine.
La plupart des hommes étaient de jeunes loups, rassemblés ici par un idéal qu’il n’avait pas trouvé dans la vie civile ou militaire qui constituait leur vie d’avant. En arrivant ici, ils n’étaient rien. Mais après une formation des plus rigoureuses, ils devenaient de véritables chiens de guerre. Cette formation, Pearce lui-même en était à l’origine. Lorsqu’il avait incorporé l’organisation il y a de ça des années, cette dernière se contentait d’embaucher des mercenaires au besoin. La qualité n’était pas toujours au rendez-vous. Sur la demande d’Handréas, il avait lui-même mis au point un programme de formation adapté pour faire face aux défis de l’avenir. Maniement des armes, survie, épreuves physiques, rien n’était laissés au hasard pour sculpter et renforcer à la fois le corps, mais aussi l’esprit.
De ses quartiers surplombant la base, Pearce était comme un aigle guettant sa couvée. Ses jeunes recrues étaient en quelque sortes l’extension de lui-même et d’Handréas, les premiers d’une nouvelle société, meilleurs, et bâti sur les ruines de sa prédécesseurs. Son regard glissa vers l’est où se situait la caserne. Le matériel militaire y était entreposé, ainsi que les quartiers du personnel. A l’ouest, en face de la caserne et de l’autre coté de la plazza, se tenait la tour de contrôle de l’île. Elle était les véritables yeux du chef de l’organisation. Toutes arrivées ou départs de l’île devaient être signaler au personnel de contrôle. La tour avait aussi pour but de gérer la circulation aérienne afin de ne pas attirer l’attention sur ce qui se passait sur le sol de l’île. Un message d’avertissement suffisait en général à effrayer les petits appareils touristiques qui pensaient alors survoler une base militaire costaricaine. Si le message radio ne suffisait pas, des défenses anti-aériennes étaient là pour faire le ménage, comme en témoignaient les quelques carcasses d’avions disséminées dans la jungle.
Les laboratoires quant à eux étaient au sous-sol. Handréas, dans un souci de sécurité, les y avait placés pour limiter les voies d’accès à ses installations hautement sensibles. Les intrus, pour se frayer un chemin jusqu’aux échantillons et aux individus clonés, devaient passer par la caserne, ce qui en découragerait plus d’un. Et pour finir, il y avait le centre de commandement. Ses quartiers, ainsi que les quartiers du personnels haut gradés et les appartements d’Handréas, y étaient disposées. L’installation se trouvait à flanc de montagne. Ou ne devrions-nous pas dire flan de volcan ? Mais contrairement au mont Sibo qui montraient quelques signes légers d’activités sur Nublar, celui qui constituait la charpente d’Isla Muerta était complément éteint. Les forces telluriques qui avaient jadis secouer cette parcelle de l’océan s’était tarie il y a fort longtemps.
Son regard relâcha son attention sur ce qu’il se passait en contrebas pour se figer finalement sur le reflet qu’il avait en face de lui. Malgré le séjour dans la cuve et les composés à base de projet T qui l’avait soignés et rendus plus fort, son corps était toujours marqué part de nombreuses cicatrices dont il ne pourrait jamais se défaire. Il y avait notamment ces cicatrices qu’il devait à James Muldoon, le ranger en chef qui était en post sur Isla Nublar cette nuit-là. Une ligne d’une quinzaine de centimètres était tracée sur la cuisse droite du soldat. C’était le premier coup que lui avait asséné le ranger. Puis ses yeux roulèrent vers son biceps gauche ou une deuxième entaille, plus petite, témoignait du second coup de lame. La troisième cicatrice se situait au niveau de son poumon gauche. Une entaille grande comme le pouce, à quelques centimètres du téton. Celle-là avait bien failli venir à bout du colosse. Ce dernier avait finalement fait sauter la falaise pour se donner une chance de fuir. Lors du départ après le raid, les membres de la Chimère avait récupéré le soldat à moitié dans mort, dans l’océan Pacifique, grâce à son transpondeur. Handréas ne voulant pas se passer de son meilleur élément, il l’avait confié à Worst qui était en charge de le remettre sur pied. Un long séjour en cuve de régénération, la pointe de la technologie médicale, avait guérie le corps meurtri du chien de guerre. Mais son esprit, mutilé par l’échec, ne lui s’en était toujours pas remis.
Ces cicatrices étaient là pour lui rappeler son échec. Non seulement il n’avait pas réussi à garder le contrôle du yatch, évincé par Emma Beckett. Mais il n’avait pas réussi à retrouver la clef manquante sur Isla Nublar. Cette clef, la dernière qui manquait, aurait permis d’accéder à la source originale du projet T. Avec ce dernier, et de pale copie conçue par Worst ou l’équipe d’Hammond, Handréas aurait été dans la mesure de faire temps de chose. Augmenter le niveau de vie des gens, réduire de ce fait les inégalités et ainsi concevoir une nouvelle société plus juste, plus équitable. C’est ce qu’Handréas lui avait promis autrefois. Mais pour pouvoir créer cette utopie, il ne fallait pas hésiter à se salir les mains. Après tout, toutes les grandes civilisations reposaient sur les ruines de la précédentes.
Le moment était finalement venu d’entrer en scène. Les ordres d’Handréas avaient été claire. Des renseignements indiquaient que Shaelynn Moore avait été aperçu en partance pour Isla Nublar. Une camera de surveillance avait enregistrée son visage quand cette dernière avait réservée deux places pour le ferry du lendemain. Les ordres quand à la suite des opération étaient claires : se rendre sur Nublar, la trouver, la suivre jusqu’au lieu ou reposer le projet T, et maîtriser la situation jusqu’à l’arrivée d’Handréas lui-même. Dans un soucis de sécurité, Handréas n’avait pas donné les clefs au soldat. Il préférait les garder sur lui et venir avec le moment venu. Pearce avait prit cette décision comme un manque de confiance envers lui dans un premier temps. Lui qui avait tous sacrifié à la cause de KC depuis des années maintenant. Mais aussi lui qui avait raté la raid sur Nublar…
Pearce enfila ses vêtements ; un tee-shirt kaki et un pantalon militaire, avant se rendre dans le couloir, en direction de l’ascenseur qui le conduirait à l’armurerie. Avec un peu de recul, il en arriva à la conclusion que les précautions d’Handréas étaient justifiées. Elle permettait également d’augmenter les chances de succès de la mission. Et quelle mission ! Si la Chimère mettait la main sur le projet T, la vie de plusieurs milliers, si ce n’est millions de personnes, allaient être chamboulées à jamais.
Tout commençait et finissait maintenant.
