Transformer la peur en espoir.

Sujet: Transformer la peur en espoir. Jeu 15 Sep 2022 - 18:31

1er juin - suite de La voix du coeur et de la raison

Shaélynn se réveilla en sursaut et se prit la tête dans les mains. Elle avait l’impression de sortir d’un sauna. Sa peau était brûlante, tremblante et humide. Ses cheveux relevés en un chignon lâche, dégoulinaient dans son cou. Son pyjama semblait avoir toutes les peines du monde à éponger sa transpiration et pourtant des frissons de froid parcouraient le corps de la jeune femme.

Avoir vécu au Costa Rica et en Egypte semblait l’avoir définitivement déshabituer au froid britannique. Elle ouvrit grand la fenêtre du motel et laissa le froid mordant entrer et heurter son corps. 1 minute plus tard, elle était gelée. Elle referma la fenêtre, aéra les draps trempés. Shaé retira son haut de pyjama et laissa glisser son jogging le long de ses jambes. Le tissu s’accrochait à sa peau humide et elle s’en débarrassa d’un mouvement de pied. Elle se dirigea vers la micro salle de bains uniquement vêtue d’une culotte, qui termina par terre devant la cabine de douche.

L’eau était tiède et la jeune femme resta de longues minutes immobile, laissant l’eau ruisseler sur son visage. Noyée dans la même torpeur qui était la sienne depuis de longs jours déjà. Elle tourna la tête vers le miroir. Le reflet qu’il renvoyait était bien éloigné de celui que les gens connaissaient de Shaélynn Moore. Ses jambes se mirent à flageoler alors la jeune femme s’assit et elle enserra ses genoux de ses bras. Sa tête appuyée contre ses genoux.

La jeune Shaélynn Moore qui avait débarqué sur Isla Nublar deux ans et demi plus tôt et dont le visage portait encore les rondeurs de l’enfance avait disparu. Ses traits s’étaient affinés, mettant plus en évidence ses pommettes saillantes et sa mâchoire volontaire. Elle avait parfois eu l'air plus jeune que ses 22 ans. En arrivant sur Nublar, on s’était souvent moqué de sa jeunesse et de son immaturité. Quand elle voyait les selfies qu’elle avait pris à cette époque, les photos qu’avait pu prendre Cole ou les clichés officiels du parc… Et qu’elle les comparait au reflet du miroir, la différence était saisissante. Elle avait l'impression d'avoir vieilli d'un coup. Des cernes foncés soulignaient ses yeux fatigués et rougis par les larmes, ses pommettes étaient saillantes, sa peau terne.

Manquer de repas, de repos, se cacher, vivre dans la peur constante et l’insécurité. Elle avait continué d’entretenir ses muscles mais avait malgré tout perdu du poids.

Non décidément, Shaélynn Moore n’était plus la même.

Fille modèle, étudiante brillante, orpheline en deuil, espionne impliquée, paléobotaniste immature, chef de section capricieuse, compagne antipathique du gérant de parc, meurtrière en fuite, étudiante discrète au Caire, vagabonde sur les traces de son propre passé…

Qui était-elle vraiment ?

Avait-elle déjà été quelqu’un ?

Avait-elle déjà été pleinement elle-même ?

Quand avait-elle été la femme qu’elle voulait être ?

L’avait-elle été un jour ?

Plusieurs fois, Shaélynn avait cru être chez elle, avoir trouvé sa place.

Plusieurs fois, Shaélynn avait connu des retours à la réalité brutaux.

Et elle avait continué malgré tout.

Comme au lendemain de la mort de son père où elle avait dû faire face aux huissiers, porté par la haine envers un père qu’elle aimait si fort et qui était tout pour elle, la veille encore.

Quand elle avait vécu dans un studio miteux et bossé dans un fast food dégueulasse avant d’accepter la proposition de Biosyn.

Lorsqu’elle avait quitté Noah, Cameron et Biosyn pour le Jurassic Park.
En fuyant Cole et le parc avec Shivak.

Lorsqu’il avait fallu se reposer entièrement sur son ancien ennemi. Shaélynn s’était jetée à corps perdus dans la recherche du projet T et de sa mère, pour faire taire son cerveau et oublier la présence de Shivak à ses côtés.

Lorsqu’ils avaient échappé à Pearce grâce à l’intervention de Marcos, Shaélynn et Shivak avaient fait face ensembles. Ils avaient trouvé la clé de Mary Moore. La vérité n’avait jamais été si proche.

Les deux compagnons s’étaient dirigés vers l’Ecosse. Tout droit dans un piège. Tout droit dans la gueule de la vérité.

Celle qui blesse, qui taille la chair, qui ne cicatrise pas.

Depuis le même cauchemar.

Elle court sous la pluie, la boue éclaboussant ses jambes, alourdissant ses chaussures. On appelle son nom, elle se retourne. Son bras remonte le long de son corps, sa main pointe l’arme sur John Hammond. Elle essaye de résister, mais son corps n’obéit pas alors elle ferme les yeux pour ne pas voir. Le coup part quand même.

Quand elle ouvre les yeux, ce n’est plus John Hammond qui lui fait face mais son propre père. C’est Jonathan qui s’effondre, la main ensanglantée serrant sa poitrine. Elle se précipite, couvre le flot de sang de ses mains. Mais les yeux de l’homme se ferment et la vie quitte son visage.

Quand elle se retourne et regarde là où elle se tenait il y a quelques instants, c’est Shivak qui se tient à sa place. Impassible. La haine lui tord les entrailles. Elle ramasse l’arme et tire.

Mais Shaélynn ne voit jamais la balle atteindre le journaliste.

Et elle se réveille toujours.

Parfois, ce n’est pas sur John qu’elle tire. Parfois, c’est Noah qu’elle tue. Et Cole qui apparaît à sa place, agonisant au sol. Parfois, elle tire sur Lewis mais c’est Cameron qui s’écroule.

A la fin, c'est toujours Shivak qui se tient depuis l’endroit où elle a tiré.

Shaélynn avait passé trop d’années dans le mensonge.

Sa vie n’avait été qu’une succession de mensonges.

Qui était-elle ?

Tout d’abord, elle n’avait jamais été orpheline de mère. Et son cher père ne s’était pas suicidé et ne l’avait jamais abandonné.

Biosyn n’avait jamais été intéressée par ses talents de botaniste ou sa soi-disant intelligence. Elle n’était qu’un moyen d’atteindre John Hammond au cœur, littéralement.

Son histoire d’amour avec Noah, son premier amour, n’avait été qu’un moyen pour Biosyn de la manipuler. Et ils s’étaient laissés prendre au piège.

Noah ne lui en avait jamais voulu pour Cameron. Il ne l’avait jamais détesté. Pour une vengeance qui n’avait pas lieu d’être, elle avait couché avec un autre homme. Elle avait déçu l’homme qu’elle aimait et en avait entraîné un dans une histoire vouée à l’échec.

Son histoire avec Cole qui avait malgré tout été aussi douce, rassurante mais engluée dans les mensonges, la trahison et les non-dits. Elle n’osait même pas penser aux conséquences pour lui.

Sa vengeance envers Hammond n’avait jamais eu de sens. Il n’était en rien responsable de la mort de ses parents. Tout avait été vain et maintenant, il était mort.

Shaélynn n’était en définitive qu’une meurtrière. Une jeune femme cupide, cruelle sans ambition, ni avenir.

Etait-ce vraiment ce qu’elle était ?

Quand elle voyait son reflet dans la glace, Shaé ne parvenait pas à savoir comment elle avait pu en arriver là. Il n’avait fallu qu’un instant de faiblesse pour qu’elle se laisse avoir par les flatteries de Lewis. Un instant de pure haine et de désir de vengeance pour sombrer. Tout avait pourtant semblé si fluide, si logique, si simple. Cela semblait si simple de s’enrôler chez Biosyn. Ce moment la hanterait sûrement toute sa vie.

Par la suite, Lewis lui avait rendu la vie si douce : il avait veillé à ce que tout lui semble clair et avait murmuré si souvent à son oreille, qu’elle avait parfois l’impression de l'entendre encore. Il semblait à tout moment être à chaque coin de rue, ou au creux de son oreille.

Pouvait-elle abréger cette souffrance ? Mettre un terme à tout.

Cette peine, ces regrets, cette culpabilité qui lui tordait les intestins et la faisaient vomir. Ce flot de pensées incessantes qui ne semblait jamais vouloir la quitter. Shaélynn était une épave. Depuis des années. Un navire qui sombrait un peu plus chaque jour, depuis que son père était parti.

Pourtant..

Shaélynn savait.

Depuis le 3 janvier 2013.

John Hammond lui avait révélé en mourant que son père ne s’était pas suicidé. Il avait été assassiné.

Shaélynn savait.

Qu’elle avait servie de cobaye pour un remède expérimental qui lui avait sauvé la vie.

Shaélynn savait.

Qu’on avait fait disparaître sa mère. Pour apprendre dans la foulée, qu’elle était sûrement encore vivante.

Alors pourquoi ? Pourquoi maintenant ?

La britannique avait toujours eu de l’espoir. L’espoir de savoir, de pouvoir agir, de réparer ses torts. A 16 ans, elle avait déjà traversé cela. La solitude. L’impression d’être à zéro, plus bas que terre. Mais à 16 ans, elle était jeune, innocente encore, l’injustice semblait couler dans ses veines à chaque instant et la poussait à chercher des solutions. Si je crois, je peux.

Une psychologue de Biosyn avec qui elle avait eu quelques séances, dans le but d’établir leurs profils psychologiques, l’avait aussi mis en garde sur sa grande tendance au déni. La britannique pensait beaucoup, se torturait les méninges avec ses problèmes puis mettait tout sous le tapis dès que le poids devenait trop lourd. Elle archivait les dossiers sans jamais les traiter en profondeur.

A l’époque, elle avait pensé que c’était cette “force” qui avait convaincu Biosyn de lui laisser une chance. Aujourd’hui, elle n’était plus aussi naïve. Cela n’avait jamais été une force. Toutes ses émotions, mal-traitées, ces deuils qu’elle n’avait fait, cette fuite en avant… Tout avait été un terrain si fertile pour la manipulation. Elle s’était vu comme une femme forte et prête à tout. Mais Biosyn avait vu la gamine vexée et abandonnée en elle. On les avait encouragés à se comporter comme une famille les uns envers les autres. Ils avaient été choisis soigneusement pour se compléter, ne former qu’un. Des gamins doués mais névrosés, blessés, avec des manques à combler. Lewis avait joué à merveille le père stricte mais protecteur menant à la baguette son petit troupeau de moutons savants.

Il avait pris à merveille la place laissée par son défunt père. Shaélynn l’avait détesté, respecter, aimer,défier. Elle avait une confiance aveugle en cet homme.

Une bombe à retardement. Voilà ce qu’elle était. Mise au pied du mur, trahie une nouvelle fois, sans ressources ni soutien, la bombe avait explosée.

C’est moi qui ai tué ton père. Avait dit Shivak.

Tout lui semblait si insurmontable aujourd’hui.

Depuis qu’elle avait appris que son père avait été assassiné, Shaélynn n’avait jamais pris la pleine mesure de l’information. A l’époque, la jeune femme avait même été soulagée de savoir que Johnathan ne l’avait pas quitté volontairement.

Mais apprendre qu’il avait été tué par un homme en qui elle avait placé sa confiance, malgré tout… Un homme qu’elle avait détesté, certes, mais l’un des seuls qui n’avait jamais menti ni sur ses intentions, ni jamais rien caché sur les plans de Biosyn. Un homme qu’elle avait appris à connaître, à apprécier même. Un homme qui avait eu 2 ans de collaboration pour lui avouer la vérité.

Un homme aussi dont elle savait combien il pouvait se montrer violent, cruel et dangereux. Peut être était-ce le plus dur. Quels mots avaient pu entendre son cher papa dans ces derniers instants ? Elle savait quelle force résidaient dans les mains qui l’avaient soulevé de terre et pendu. Shaélynn connaissait la violence du venin qui pouvaient sortir des lèvres de l’ancien journaliste. Rien qu’en fermant les yeux, le dessin de son rictus sadique apparaissait devant elle.

Un homme qui pouvait avoir deux faces, deux personnalités. Elle avait vu les deux. L’espionne avait détesté l’une de toutes les fibres de son corps. La femme avait appris à s’en remettre à l’autre et à le pleurer quand tout semblait perdu.

Mais ce n’était pas à cause de lui que Shaélynn s’effondrait. Cela aurait été lui accorder plus d’importance qu’il n’en avait. Même après avoir perdu la clé. Même après avoir perdu confiance en Shivak.

La britannique avait gardé l’espoir. Il lui restait un allié, quelque part. Une histoire en suspens, un homme auprès de qui elle pouvait trouver des réponses. La jeune femme avait vu cela comme un signe du destin. L’approcher était à sa portée. Serait-il surveillé ?

Shaélynn n’avait plus rien à perdre de toute façon. Et elle avait donc tenté sa chance.

Et sa rencontre avec Noah l’avait totalement déstabilisé. Rien ne s’était passé comme elle avait pu l’espérer. Pourtant, la discussion avait commencé par être apaisante pour elle. Il avait mis du baume à ses blessures et cicatriser des plaies qu’elle pensait éternelles. Et puis tout avait pris un tournant qu’elle n’avait pas envisagé. Toute la paix qu’elle commençait à ressentir en elle avait été balayée.

Quelque part au fond d’elle, Shaélynn avait espéré que cette rencontre lui montre la voie à suivre. Qu’elle lui donne la force de prendre une décision. En 2 ans et demi, Noah avait parcouru bien plus de chemin qu’elle. Il était sorti victorieux d’un combat que Shaélynn n’avait vraiment jamais commencé. Et qu’elle n’était pas sûre de vouloir mener.

Après y avoir vécu si longtemps, l’américain connaissait les moindres recoins de son cœur. Il savait traduire le moindre de ses mensonges, écouter chacun de ses silences coupables et entendre chacun de ses non-dits.

L’américain de son côté avait choisis de faire le deuil de son père, de son ami, de ses actes, de sa vengeance. Il avait accepté que les remords ne le quitteraient jamais complètement et il avait décidé d’apprendre à vivre avec.

Shaélynn savait que leurs situations étaient différentes. Elle ne pouvait pas simplement tourner les talons et partir refaire sa vie ailleurs. Le projet T était là quelque part, en danger. Si KC s’en emparait, il serait utilisé pour faire des dégâts, des gens mourraient… Par sa faute. Elle ne pouvait pas vivre avec ce doute. Ce n’était pas quelque chose qu’elle laisserait derrière elle. C’était un danger qui l’attendait plus loin, quel que soit le chemin qu’elle emprunterait. Qui pouvait surgir n’importe quand et balayer ce qu’elle aurait construit.

L’enregistrement laissé par Cameron avait achevé de lui ôter toute envie de laisser tomber. Il s’était sacrifié pour elle. Elle ne pouvait pas juste passer à autre chose.

‘Elle ne va jamais lâcher Noah. Tu la connais comme moi… Peu importe le nombre de fois où les gens qu’elle aime la laisse tomber, Shaé, elle ira jusqu’au bout. Elle a confiance en Lewis. Il faut que je la prévienne avant qu’il ne soit trop tard. Fais pas le con, te mets pas mal avec eux. Et si tu la vois avant moi, dis-lui que c’était ma décision. Et… Je vous aime ,tous les deux, prends soin de toi, mon pote. Et prends soin de Shae.”

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Pour la jeune femme, le jeune informaticien avait été un pillier. Lui, si peu sûr de lui lors de leur rencontre, s’était transformé sous l’influence de ses deux camarades. Contrairement à eux, Cameron n’avait pas de passé difficile ou de problèmes d’argent. Biosyn l’avait approché car il était incroyablement doué dans ce qu’il faisait. Ses petites intrusions informatiques lui avaient cependant fermé définitivement les portes qui s’ouvraient à lui et il avait saisi l’opportunité qu’on lui présentait.

Contrairement à ce qu’avait pu penser certaines personnes, il n’y avait jamais eu rien de romantique entre Cameron et Shaé. Les petits jeux de séduction de la jeune femme n’avait jamais marché sur lui. En fait, aucun de ses petits jeux ne marchaient jamais sur lui. Il avait eu cette manière de lui répondre d’une voix calme, sans fioriture, sans flatterie pour lui indiquer qu’il voyait clair dans son jeu.

Les gens voyaient l’amour inconditionnel et la confiance qui émanait d’eux et le transformait en quelque chose qui n’existait pas. En dehors des salles de classe, ils étaient tous les 3 indissociables attirant les regards par le contraste qu’ils formaient. Le beau et grand américain brun, major de promo et quaterback de l’équipe universitaire, la jolie Anglaise au corps dynamique moulé dans son uniforme de cheerleader, hautaine et surdouée dans les études, et puis lui. Le geek, anglais lui aussi, discret, un peu rondouillet dans ses grands pulls et mal dans sa peau. Les autres étudiants s’étonnaient de voir la jolie Shaélynn et le petit Cameron rire ensembles, de voir la jeune femme arranger tendrement les cheveux de l’informaticien, de réajuster ses vêtements comme elle aurait pu le faire pour un enfant. Souvent il passait un bras autour de ses épaules et elle appuyait sa tête sur la sienne. Ils avaient toujours pleins de gestes d’affection l’un pour l’autre.

Ils s'étonnaient de voir leur populaire quarterback engagé dans des débats survoltés sur la pop culture ou des procédés mathématiques ou informatiques poussés avec celui qu’ils prenaient pour un loup solitaire tandis qu’elle, la tête plongée dans ses bouquins, essayait de réviser. L’énergie débordante de Noah et la joie de vivre de Shaélynn, sortait Cameron de sa torpeur. Parfois, il tentait de se mesurer à Noah en l’attaquant par surprise avec la complicité de son amie. Lewis leur avait souvent reproché de se conduire comme une portée de jeunes chiots plutôt que comme des étudiants prometteurs.

Le fait que Noah et Shaé forment un couple n’avait pas le moindre impact sur cet équilibre. Cameron était le frère qu’ils n’avaient jamais eu. A 3, ils s’étaient créé un petit cocon familial où Lewis jouait l’autorité parentale. Eux 3 contre le monde. Cameron c’était la force tranquille, le murmure qui apaisait les cœurs et les égos de ses amis. A un point qu’ils n’avaient pas imaginés. Rien n’avait survécu à sa mort. Ni leur couple ni la mission.

Ces 6 ans avec eux avaient été les plus heureuses de la vie de Shaé. Même son enfance avec son père avait toujours été teintés de gris par la dépression de son père. Elle n’avait jamais osé le décevoir et était restée dans le rang. Avec eux, elle avait enfin vécu, aimé sans conditions. Si Biosyn avait créé un format propice et s’ils avaient exploité cela, Shaélynn savait désormais que tout avait été vrai et sincère. Pour tous les 3. Elle s’était montré à eux tel qu’elle était, sans fard, sans faux semblants. Plus jamais elle ne voulait ternir ses souvenirs si précieux avec les manigances de Biosyn.

La britannique n’avait plus ressentis cela depuis longtemps. Cet étourdissement de vivre sans masque, ce lâcher prise total, sans arrière pensée, ce bonheur d’être pleinement elle et de laisser son cœur la guider.

Malgré la culpabilité et la honte qui l’assaillaient quand elle y pensait, Shaélynn savait que ses retrouvailles en Egypte, avec Shivak, lui avaient permis d’éprouver de nouveau ses sensations quelques heures durant.

Elle savait aussi qu’elle ne voulait plus fuir, elle ne voulait plus repartir continuellement à zéro. Shaélynn voulait choisir pour elle, apaiser ses blessures et se construire son futur.

Elle voulait vivre.

En sortant de la douche, la fugitive s’enroula dans une serviette qu’elle noua autour de sa poitrine et s’affala sur le lit. Elle le faisait par habitude mais ce soir-là, elle ne s’attarda pas longtemps car il faisait encore un froid à vous glacer les os. Elle s’empressa de mettre un nouveau pyjama : un vieux legging de sport et un t-shirt. Elle prit machinalement le premier vêtement à matière chaude qui lui tomba sous la main mais s’aperçut qu’il s’agissait de la chemise en laine de Cameron. Elle le porta à son nez mais après 2 ans à avoir été porté par Noah… Il n’avait que l’odeur de ce dernier. C’était reparti pour le torrent de larmes. Elle n’en pouvait plus de pleurer.

A se demander comment il lui restait encore des larmes.

Shaélynn prit plusieurs rapides inspirations suivant de longues expirations pour se calmer. Noah avait raison. Sur tout la ligne.

Il fallait qu'elle sorte de cette impasse.

Elle n’était peut-être pas prête à revoir Shivak, à lui pardonner ni même à lui faire confiance à nouveau.

Mais il y avait quelqu'un qui était toujours resté droit dans ses bottes, à la recherche de la vérité, quelqu’un qui avait su lui pardonner ses erreurs pour mener à bien la recherche du projet T. Un homme à qui elle avait sauvé la vie. Et qui avait sauvé la sienne par deux fois. Un homme en qui elle pouvait placer sa confiance.

Comme toujours Noah avait raison.

Shaélynn devait retrouver Marcos Shannon.

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